Accueil » Blog » Le délai de reprise en matière fiscale

Introduction

 

Le droit de reprise est la faculté dont dispose l’administration fiscale de rectifier le montant de l’impôt dû par le contribuable. Le délai de reprise (ou de prescription) est la période au cours de laquelle des impositions primitives ou supplémentaires peuvent être mises en recouvrement. 

 

Il existe deux modes de mise en recouvrement. Le recouvrement par voie de rôle désigne le fait qu’une liste de contribuables est établie préalablement au recouvrement de l’impôt. Tel est par exemple le cas en matière d’impôt sur le revenu (IR). 

 

Le recouvrement par voie de notification d’un avis de mise en recouvrement est prévu lorsque le paiement des autres impôts et taxes n’est pas précédé de l’émission d’un titre. L’impôt est calculé par le contribuable, et doit être acquitté spontanément dans les délais fixés par les textes législatifs ou réglementaires. En cas de défaut de paiement à l’échéance, le comptable public émet un titre authentifiant la créance du Trésor : l’avis de mise en recouvrement (AMR). Tel est le cas en matière d’impôt sur les sociétés, de TVA, ou encore de droits d’enregistrement.

 

Le principe : le délai subsidiaire de 6 ans

 

En principe, si la loi ne prévoit pas l’application d’un autre délai, le droit de reprise de l’administration s’exerce jusqu’à l’expiration de la sixième  année suivant celle du fait générateur de l’impôt (L. 186 du LPF).

 

La prescription du droit de reprise s’apprécie à la date de la mise en recouvrement (CE, 21 juill. 1970, n° 75085).

 

Les exceptions

 

En matière d’IR et d’IS, le droit de reprise de l’administration s’exerce jusqu’à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due (L. 169 du LPF).

 

En matière de taxe sur les salaires et de retenues à la sources le droit de reprise de l’administration s’exerce également jusqu’à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due (L. 169 A).

 

Les omissions ou les erreurs concernant la taxe professionnelle, la cotisation foncière des entreprises (CFE) et la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) peuvent être réparées par l’administration jusqu’à l’expiration de la troisième année suivant celle au titre de laquelle l’imposition est due (L. 174 du LPF).

 

En matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA), le droit de reprise de l’administration s’exerce également jusqu’à la fin de la troisième année suivant celle au cours de laquelle la taxe est exigible (L. 176 du LPF).

 

Pour ce qui concerne les droits d’enregistrement et  l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) le droit de reprise de l’administration s’exerce jusqu’à la fin de la troisième suivant celle de l’enregistrement de l’acte ou de la déclaration (L. 180 du LPF), à condition que l’exigibilité des droits et taxes a été « suffisamment révélée » par l’acte enregistré ou la déclaration. Il est à noter que des lettres envoyées à l’administration ne font pas courir la prescription abrégée (Cass. com. 17 janvier 2018 n° 16-19.494).

 

En matière de taxe foncière, de taxe d’habitation et pour les autres impôts locaux, le droit de reprise de l’administration des impôts s’exerce jusqu’à la fin de l’année suivant celle au titre de laquelle l’imposition est due. (art. L. 173 du LPF).

 

La majoration du délai de reprise

 

En l’absence d’enregistrement ou de déclaration, le délai de reprise en matière de droits d’enregistrement et d’IFI est porté à la fin de la sixième année suivant celle du fait générateur de ces impôts ou droits. Pour rappel, le fait générateur de l’IFI est d’avoir un patrimoine immobilier dont la valeur nette est supérieure à 1.300.000 € au 1er janvier de l’année. Par ailleurs, lorsque l’exigibilité des impôts relatifs à des avoirs détenus à l’étranger n’a pas été suffisamment révélée dans le document enregistré, le délai de reprise est porté à 10 ans (art. L. 181-0 A du LPF).

 

En matière d’IR et d’IS, l’article L. 169 du LPF étend le délai de reprise jusqu’à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due en cas d’activités occultes, de procès-verbal de flagrance fiscale, de non déclaration de comptes détenus à l’étranger (cette disposition a été jugée conformes à la Constitution – CE QPC 1er mars 2017, Mme Barbary de Langlade, n° 405711) ou en cas de non respect des obligations prévues aux articles 123 bis et 209 B du CGI (détention d’une entité soumise à un régime fiscal privilégié).

 

L’effet relatif du délai de reprise en matière d’IS

 

En principe, les déficits reportables sont considérés comme une charge de l’exercice suivant (209 I du CGI). L’administration peut donc contrôler le déficit d’un exercice prescrit, imputé sur le bénéfice d’un exercice non prescrit.

 

Au sein d’un groupe intégré, un éventuel déficit d’ensemble provient de la somme algébrique des résultats des sociétés membres du groupe. L’administration peut contrôler les résultats (positifs ou négatifs) d’exercices prescrits qui ont concouru au déficit d’ensemble imputé sur le bénéfice d’ensemble d’un exercice non prescrit, sans toutefois pouvoir majorer le résultat imposable d’un montant supérieur au déficit imputé sur les exercices non prescrits (art. 223 A et s. du CGI).

 

Les délais spéciaux et les prorogations

 

En ce qui concerne l’IR, lorsque à la suite de l’ouverture de la succession d’un contribuable ou de l’un des époux soumis à une imposition commune, il est constaté que le défunt n’a pas été imposé ou a été insuffisamment imposé au titre de l’année du décès ou de l’une des quatre années antérieures, l’impôt sur le revenu qui n’a pas été établi peut être mis en recouvrement jusqu’à la fin de la deuxième année suivant l’année de la déclaration de succession ou, si cette déclaration n’a pas été faite, l’année du paiement par les héritiers des droits de mutation par décès (L. 172 du LPF).

 

Par ailleurs, si l’administration fiscale saisit le juge pénal, le délai de reprise est prolongé de 2 ans. Le recouvrement des impositions correspondant à la période qui excède le délai ordinaire de prescription est suspendu. Ces impositions sont caduques si la procédure judiciaire se termine par une ordonnance de non-lieu ou si les personnes poursuivies bénéficient d’une décision de relaxe (art. L. 187 du LPF).

 

Aussi, lorsqu’une plainte a abouti à l’ouverture d’une enquête pour fraude fiscale, le délai est prorogé jusqu’à fin de l’année qui suit la décision mettant fin à la procédure et, au plus tard, jusqu’à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due.

 

Enfin, lorsque l’administration a, dans le délai initial de reprise, demandé à l’autorité compétente d’un autre Etat ou territoire des renseignements concernant un contribuable, elle peut réparer les omissions ou les insuffisances d’imposition afférentes à cette demande, même si le délai initial de reprise est écoulé, jusqu’à la fin de l’année qui suit celle de la réception de la réponse et, au plus tard, jusqu’au 31 décembre de la troisième année suivant celle au titre de laquelle le délai initial de reprise est écoulé (loi du 6 déc. 2013).

 

L’article L. 188 C du LPF prévoit qu’en cas d’omissions ou d’insuffisances d’imposition révélées par une instance devant les tribunaux ou par une réclamation contentieuse, le délai de reprise court jusqu’à la fin de l’année suivant celle de la décision qui a clos l’instance et, au plus tard, jusqu’à la fin de la 10 année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due.

 

L’interruption du délai de reprise

 

L’article L. 189 du LPF prévoit que le délai de reprise est interrompu par la notification d’une proposition de rectification régulière (ou des bases imposées d’office).

 

L’interruption fait courir un nouveau délai de même durée. En cas d’abandon ultérieur du redressement (décharge ou dégrèvement), l’interruption du délai reste acquise à l’administration.

 

La date d’interruption est celle à laquelle le pli contenant la proposition de rectification a été présenté à l’adresse du contribuable, même en son absence (CE 14 octobre 2015, n° 378503, min ; c/ M. et Mme Brochet).

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